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Les sept légendes du GAZ-69.

De nos jours, le GAZ-69 connait un second pic de popularité : il est la star des rencontres de voitures anciennes ou l'invité d’honneur des sorties de tout-terrain. On a même appris récemment qu’une nouvelle version de ce GAZ serait fabriquée en petite série. N’est-ce pas trop pour ce vieux « Kozlik » ?

Trouver pour un essai un exemplaire de GAZ-69 en état d’origine n’a pas été chose facile. Il faut aller loin pour mettre la main sur une voiture utilisée encore tous les jours. Ce n’est pas qu’il soit rare mais le GAZ-69 a souvent été profondément modifié : adapté à la vie moderne, modifié pour en faciliter l’entretien et les réparations. Mais nous avons trouvé un exemplaire encore totalement d’origine et qui a été restauré, un modèle de 1968 dans une très rare couleur sable. Nous l’avons essayé pour comprendre pourquoi les propriétaires des GAZ-69 sont si fiers de leur 4x4 et avons tenté de mettre à mal les sept légendes qui lui collent à la peau.

Légende N°1 : il pouvait passer partout.
Cela semble vrai. Tel qu’il sortait d’usine avec ses pneus standards, le GAZ-69 offre déjà une excellente maniabilité en tout-terrain. Il n’est même pas nécessaire de le transformer avec des accessoires modernes. Pour preuve : en première sur la gamme courte, le « Gazik » est capable de traverser en toute confiance un marais de 35 à 40 centimètres de profondeur sur plus d’un kilomètre et mettre y prendre de la vitesse. Tout ceci est rendu possible par un sérieux « arsenal » de transmission et un moteur offrant un couple très élevé à basse vitesse.

Outre l’essieu avant enclenchable, le « Kozlik » est équipé d’une boîte de transfert à deux gammes de rapports (les vitesses de la gamme courte ayant un rapport de démultiplication de 1,15 à 2,78). Autre exemple : pour rejoindre l’endroit de notre séance photo, j’ai commencé à grimper une pente enneigée de 8% sur le seul essieu arrière. Au milieu de l'ascension j’ai commencé à patiner et la voiture a même commencé à repartir en arrière. J’ai enclenché rapidement le pont avant sans imaginer que je pourrai recommencer à grimper. Le GAZ a pourtant recommencé à grimper, sans le moindre début de patinage et calmement, sans aucun à-coup, et il a rejoint le sommet de la colline. Voilà à quoi sert un bon couple à bas régime : 123 Nm dès 2,000 tr/min !

La conduite sur la neige fraiche est d’ailleurs une expérience intéressante : quelle que soit la bosse, l’ornière, la congère, la voiture continue à évoluer au même rythme sans rien remarquer. Bien sûr, on ne parle pas ici de confort. Cela secoue beaucoup et les mains doivent tenir fermement le volant, mais nous ne sommes pas là non plus pour partager une coupe de champagne avec une demoiselle !

A l’époque, les tests effectués par l’armée ont montré que le GAZ-69 pouvait surmonter facilement des gués de 50 à 60 cm sans aucune préparation et que si l’on retirait la courroie de ventilateur et que l’on scellait hermétiquement le puis de jauge, les 80 cm de profondeur étaient largement possibles.

Les militaires appréciaient également le GAZ-69 pour sa garde au sol élevée (211 mm au point le plus bas) et les angles d’attaque - 48° à l’avant et 37° à l’arrière. Par comparaison la Jeep Willys avait des angles de 49° et 35°. On avait toutefois noté parmi les points faibles une puissance peu élevée (seulement 28,4 ch pour une tonne) et le fait que seuls des pneus universels étaient disponibles, lesquels étaient franchement peu adaptés à certaines surfaces (neige compacte, marécages, etc...).

Légende N°2 : le meilleur 4x4 du monde au milieu du XXème siècle.
C’était très probablement vrai. Ou tout du moins il faisait partie des deux ou trois meilleurs. Son plus gros problème c'est qu’il n’a pas été aussi diffusé que certains de ses concurrents. Il y a toutefois une raison : il n’en avait pas besoin. Ce pays immense qu’était l’URSS absorbait la quasi-totalité de sa production. Dans les années 50, il avait en fait peu de concurrents directs à part la Willys CJ-3, le Land Rover Série 1 et le Toyota BJ. Il n’a jamais été directement comparé à eux mais dans les pays où ce véhicule soviétique a été exporté comme l’Indonésie, l’Irak, l’Afghanistan, l’Algérie et l’Egypte, on parlait souvent de ses points forts. On sait aussi que dans ces pays, avant de signer un accord de livraison avec GAZ, les organisations intéressées ont effectué des tests comparatifs avec ses principaux concurrents.

Si on pourrait discuter longuement pour trouver le meilleur pour les capacités en tout-terrain ou la fiabilité, il ne fait aucun doute que sur le plan du confort le GAZ-69 surclassait ses concurrents étrangers : le Willys américain et l’ancêtre japonais du « Kruzak » n’avaient même pas de portières métalliques, elles étaient remplacées par des tabliers en toile. Le Land Rover Série I n’avait pas de chauffage. Certes, on ne peut pas parler de la grande efficacité de celui du « Kozlik » en raison de l’absence de joints de portières ou la fente dans bâche pour pouvoir régler le phare de recherche, mais on pouvait tout de même conduire sans gants par grand froid !

Légende N°3 : ce n’est pas pour rien qu’on le surnomme « la chèvre ».
Le surnom de « Kozlik » (la chèvre) colle fermement à la peau de notre héros d’aujourd’hui. Pourquoi ce surnom ? La raison principale vient de certains aspects du réglage de sa suspension et de son empattement relativement court. Sur les petites bosses et lors des freinages brusques, le GAZ-69 est en effet nettement pris de soubresaut d’avant en arrière, comme un chèvre ! Les amortisseurs à leviers primitifs sont en effet incapables d’amortir ces mouvements et l’’empattement court ne permet pas de les stabiliser en fonction de la route. Même durant mon court essai sur terrain accidenté et sur des routes de campagnes mal entretenues, j’ai pu vraiment apprécier ce phénomène caractéristique !

Il est intéressant de noter que même le UAZ-469, qui a remplacé le GAZ en 1972 n’a pas été en mesure de se débarrasser de ce trait de famille commun à tous les tout-terrains militaires soviétiques. Pour autant que je sache, les Land Rover de la même époque n’avaient pas le même problème.

Légende N°4 : il a été créé pour les militaires et a été principalement livré à eux.
C’est vrai. En effet, dans les années cinquante, la mission principale de ce nouveau tout-terrain était de servir dans les forces armées. Tous les essais, ceux effectués au début par l’usine puis ceux faits ensuite par les ministères l'ont été avec des remorques militaires (la fameuse cantine de campagne GAZ-704 de 500 kg) ou avec des petits systèmes d’artillerie type canons légers. Le GAZ-69 de base (à deux portes) était d’ailleurs utilisé comme véhicule tracteur ou comme véhicule de transport de troupes (outre les deux passagers avant, il pouvait accueillir six soldats sur les banquettes longitudinales arrière). Le GAZ-69A à quatre portes était utilisé comme véhicule de commandement ou véhicule de liaison.

Curieusement, certains véhicules spéciaux ont été construits sur la base du « Kozlik ». Le plus insolite est peut-être le lance-roquette ZM6 « Chmel ». Derrière les sièges avant étaient installés quatre rails pour lancer les missiles anti-chars. Malgré le faible nombre d’exemplaires produits, ce GAZ-69 a servi au combat par exemple aux côtés des Grecs durant le conflit gréco-turc de Chypre. En outre le « Gazik » a été utilisé comme véhicule de déminage compact, comme châssis pouvant recevoir plusieurs stations de radio, comme véhicule de guidage sur les aérodromes, etc...

Et pourtant, le nom donné au premier prototype de GAZ-69, le « travailleur », indique que ce tout-terrain avait été avant tout conçu pour l’économie nationale. Il a effectivement été utilisé dans le civil, en premier lieu à la campagne. Il était au service des présidents de kolkhozes, des agronomes et des travailleurs du parti qui devaient rouler sur chaussées non revêtues et par tous les temps.

Légende N°5 : son toit en toile est une chose terrible.
C’est peu de le dire ! Pourtant cette affirmation est très controversée puisqu’elle ne tient pas compte de toutes ses particularités. Il est important de comprendre que la plupart des versions de GAZ-69 disposent d’un toit souple en raison du fait qu’ils étaient destinés à servir dans l’armée (toutes les versions civiles étaient mobilisables en cas de guerre). En rabattant le pare-brise et en retirant la bâche de toit , ce tout-terrain devenait nettement moins haut et était donc moins visible.

Parmi les inconvénients, il faut noter qu’après quelques heures de route sous la pluie on était totalement trempé, qu’il n’y avait pas de joints, qu’on souffrait de courants d’air à l’intérieur de l’habitacle à plus de 40 km/h et qu’il n’y avait aucune isolation phonique !

De nos jours, peu de gens savent que des petites sociétés spécialisées ont fabriqué en petite série des GAZ-69 avec des toits en dur pour la police de la route (GAI), les services de dégrisement, les services médicaux. Une série pilote de fourgons GAZ-19 conçus pour la distribution du courrier a même été produite. Mais le secteur du transport a été rapidement transmis à UAZ et son « Bukhanka » et le « Kozlik » fourgonnette a vite été oublié.

Légende N°6 : il a sauté en parachute !
Et pas seulement ! En effet, dans sa carrière professionnelle, le GAZ-69 a volé, sauté en parachute et a même nagé. Grâce à sa faible hauteur toit replié et à ses dimensions compactes, ce tout-terrain pouvait être facilement chargé dans un avion ou un hélicoptère de transport. La soute du petit hélicoptère Mi-4 a été conçue précisément pour transporter ce véhicule !

Pour sauter en parachute on démontait les pièces saillantes (roue de secours et pare-chocs), puis on l’installait sur une plateforme spéciale et tout seul comme un grand, il pouvait atterrir sur tout type de surface.

Quant à la version amphibie, on a conçu le GAZ-46 amphibie plus connu sous le nom de MAV pour les troupes du génie. Ce véhicule amphibie a été produit pendant seulement cinq ans (de 1953 à 1958). La cessation de production est en partie dûe au fait que la production du GAZ-69 a été transférée à Oulianovsk et que chez UAZ on n’était pas prêt pour assembler un véhicule technologiquement plus complexe.

Légende N°7 : on peut le réparer même au Pôle Nord.
Pourquoi pas ? Le GAZ-69 a été conçu pour fonctionner loin des ateliers de réparation automobiles et c’est pourquoi le nombre de composants et de pièces complexes a été limité au maximum. La plupart des opérations d’entretien peuvent être effectuées au plus proche du terrain, dans des stations de machines agricoles, dans des garages primitivement équipés, etc...

La facilité et la simplicité sont l’un des principaux points du projet technique du GAZ-69. Ainsi, au début des années 50, le « Kozlik » était la seule voiture d’URSS dont les pièces principales avaient été développées pour d’autres modèles. Le moteur, la transmission, les freins, les pièces de suspension étaient communes à d’autres voitures. On avait fait cela dans le but d’éviter les défauts de conception et les maladies de jeunesse, pour simplifier l’entretien et la fourniture de pièces de rechange.

Le GAZ-69 était dès ses débuts un exemple intéressant de la culture technique de l’URSS. Il attirait les gens sans publicité et sans articles dans la presse, mais seulement par sa capacité à franchir boue, sable, neige et marais de diverses consistances. C’est sans doute la raison pour laquelle toutes les légendes qui tournent aujourd’hui autour de lui se révèlent être la pure vérité !

Lu sur : http://www.kolesa.ru/test-drive/kozlit-ili-ne-kozlit-7-mifov-pro-gaz69-2016-02-11
Adaptation VG

Tag(s) : #Histoire, #GAZ, #GAZ-69, #Militaire, #Top